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Les avis en ligne influencent profondément la réputation et le chiffre d’affaires des commerçants et des professions libérales, il donc est vital, pour un entrepreneur ou commerçant, de bien comprendre les notions juridiques de diffamation et calomnie. Ces deux infractions du droit pénal ont des implications différentes, notamment dans la manière dont une entreprise peut réagir face à un avis négatif publié sur des plateformes comme Google.

Cet article vise à clarifier ces notions, expliquer pourquoi un avis négatif peut constituer une diffamation publique, et comment cette distinction impacte les démarches juridiques à engager.

1. Diffamation et calomnie : définitions légales et distinctions clés

1.1 Qu’est-ce que la diffamation ?

La diffamation est définie par l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, qui régit aussi les injures et les propos publics diffamatoires.

« Est diffamatoire toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération d’une personne ou d’un corps constitué. »

La diffamation peut être :

  • publique : lorsqu’elle est proférée devant un public ou sur un média accessible au public (réseaux sociaux, forums, sites d’avis, etc.) ;
  • non publique : lorsqu’elle est dite à une ou plusieurs personnes, mais sans diffusion large.

Dans le cas d’un avis Google, l’infraction est bien une diffamation publique, car l’avis est visible par tous les internautes.

Source officielle Service-Public.fr : Diffamation, injure, propos discriminatoires : que dit la loi ?

1.2 Qu’est-ce que la calomnie ?

La calomnie est une forme particulière de diffamation, caractérisée par le fait que l’allégation diffamatoire est fausse et que l’auteur sait que cette accusation est fausse.

En d’autres termes :

  • La diffamation peut être vraie ou fausse (la vérité est une défense légale possible) ;
  • La calomnie implique une volonté délibérée de nuire par des accusations fausses.

L’article 29 de la loi de 1881 indique que la calomnie est une diffamation avec une intention malveillante avérée.

Exemple : Accuser sans preuve un commerçant d’une fraude alors que l’on sait que ce n’est pas vrai.

2. Pourquoi un avis négatif sur Google peut être une diffamation publique

2.1 La portée publique des avis en ligne

Les avis publiés sur Google sont accessibles à tous, ce qui correspond à la définition légale de la diffamation publique.

Lorsqu’un client ou un concurrent publie un avis négatif contenant une allégation ou une imputation de fait qui porte atteinte à la réputation d’un professionnel, cela peut constituer une diffamation.

2.2 Diffamation vs simple opinion

Attention : exprimer une opinion ou un ressenti personnel n’est pas une diffamation. Seule une allégation factuelle (par exemple, « ce commerçant ne respecte pas les délais » ou « il a volé de l’argent ») peut être juridiquement contestée.

Exemple :

  • « Je n’ai pas aimé le service » = opinion = pas diffamation.
  • « Ce commerçant m’a volé 100 € » = allégation factuelle = diffamation si fausse.

2.3 Un avis négatif peut-il être un délit ?

Oui, lorsque cet avis contient une allégation de fait fausse et nuisible à l’honneur ou à la réputation, il peut être considéré comme une diffamation publique.

Le professionnel victime a alors la possibilité d’engager des poursuites pénales pour diffamation.

3. Impacts juridiques : diffamation ou calomnie, quelles conséquences ?

3.1 La preuve de la diffamation

Dans une plainte pour diffamation, la charge de la preuve est particulière :

  • C’est à la personne qui a émis l’avis de prouver que ses propos sont vrais (article 31 de la loi de 1881).
  • Le plaignant n’a pas à prouver que les propos sont faux, mais que ces propos portent atteinte à sa réputation.

Cela signifie que pour défendre sa réputation, il faut montrer que l’avis contient des faits inexactes.

3.2 Le cas particulier de la calomnie

Si le professionnel démontre que l’auteur de l’avis négatif savait que ses accusations étaient fausses, il pourra alors constituer la calomnie.

Dans ce cas, les sanctions sont plus lourdes car la volonté malveillante est établie.

3.3 Sanctions encourues

  • Pour la diffamation publique : jusqu’à 12 000 € d’amende et des dommages-intérêts civils.
  • Pour la calomnie (diffamation avec intention de nuire) : sanctions pénales plus sévères, pouvant aller jusqu’à des peines de prison selon la gravité.

Source Justifit : Comment porter plainte pour diffamation ?

4. Comment réagir face à un avis négatif diffamatoire sur Google ?

4.1 Les démarches préalables à la plainte

Avant de lancer une procédure judiciaire, plusieurs étapes sont conseillées :

  • Contacter l’auteur de l’avis pour demander une modification ou suppression à l’amiable.
  • Signaler l’avis à Google via la plateforme dédiée en demandant la suppression pour contenu illicite.

4.2 Porter plainte pour diffamation

Si ces démarches ne suffisent pas, le professionnel peut porter plainte. La plainte doit :

  • Décrire précisément les propos litigieux ;
  • Fournir des preuves de leur caractère faux ou diffamatoire ;
  • Identifier l’auteur si possible (Google peut fournir l’identité sur demande judiciaire).

Il vous faudra nécessairement faire un constat de huissier en ligne.

4.3 Cas pratique : une entreprise qui obtient 89 000 € de dommages-intérêts

Un exemple récent relayé par Le Parisien illustre l’importance d’agir :

Un bar a été accusé à tort sur Facebook d’être parti sans payer. Après avoir porté plainte pour diffamation, il a obtenu 89 000 € en dommages-intérêts.

Cet exemple montre que des avis ou propos diffamatoires peuvent engendrer de lourdes condamnations.

Source Le Parisien : Un bar obtient 89 000 € après des accusations Facebook mensongères

5. Conseils pratiques pour les commerçants et professions libérales

5.1 Surveillez votre e-réputation activement

Il est important de surveiller régulièrement les articles, blog ou avis en ligne via Google Alertes ou des outils spécialisés. Généralement tout contenu datant de plus de 3 mois est considéré comme accepté.

5.2 Répondre avec diplomatie

Pour chaque avis négatif, une réponse professionnelle peut désamorcer les conflits et montrer que vous êtes à l’écoute, sans jamais tomber dans l’attaque. Prenez un avis négatif comme une opportunité de montrer votre professionnalisme et votre relation client par exemple.

5.3 Préparez votre dossier en cas de procédure

Conservez toutes les preuves (captures d’écran, échanges) et contactez un avocat spécialisé en droit de la presse ou e-réputation.

5.4 Comprenez vos droits mais aussi vos limites

La liberté d’expression protège les avis honnêtes et les critiques. Seules les allégations fausses et nuisibles sont sanctionnables.

6. Résumé des points clés

Notion Définition Exemples Sanctions possibles
Diffamation Allégation ou imputation d’un fait portant atteinte à l’honneur, vraie ou fausse « Ce commerçant a volé » (faux) Amende jusqu’à 12 000 € + dommages-intérêts
Calomnie Diffamation fausse avec intention de nuire Accusation mensongère et consciente Sanctions pénales plus sévères, possible prison
Avis négatif public Constitue une diffamation publique si contient des faits faux et nuisibles Avis Google négatif diffamatoire Plainte possible, demande de suppression
Opinion simple Critique ou ressenti personnel sans allégation factuelle « Mauvais service » sans accusation factuelle Protégée par la liberté d’expression

Ma vision d’expert :

Pour un commerçant ou une profession libérale, la gestion des avis négatifs est un enjeu stratégique. Comprendre la différence entre diffamation et calomnie permet de mieux évaluer ses recours, en évitant de confondre critiques légitimes et attaques malveillantes. Face à un avis en ligne, la démarche la plus efficace reste d’abord la gestion relationnelle et la réponse constructive. Mais en cas de propos diffamatoires publics, il est important de ne pas hésiter à faire valoir ses droits, avec l’accompagnement d’un professionnel du droit.

Si vous souhaitez être accompagné dans la gestion de votre e-réputation et les démarches juridiques en cas de diffamation en ligne, n’hésitez pas à consulter un avocat spécialisé ou un expert en réputation digitale.